Nunchi: le sixième sens des Coréens

Le nunchi (ou noonchi) est l’art subtil d’écouter et de ressentir les émotions de l’autre. Ou, si on veut, la faculté de décoder les signaux non verbaux. Cette forme d’intelligence émotionnelle n’est pas un don : c’est un précepte à acquérir pour établir de bonnes relations interpersonnelles et naviguer harmonieusement en société. Leçons à tirer.

Photo Gabriele Diwal



Le nunchi, qui date de plusieurs millénaires, a longtemps été l’arme de survie des faibles. À une époque où les inégalités sociales étaient la norme, en Corée comme ailleurs, la capacité de saisir les besoins, désirs et intentions de la classe dominante pouvait faire toute la différence. Ce principe fondamental est encore utile de nos jours, mais pas pour les mêmes raisons!

Ça n’a rien d’ésotérique. Le nunchi est tout simplement une discipline de l’intuition, qui peut très bien cohabiter avec une démarche analytique. Lorsqu’on adopte la posture mentale qui nous permet de nous téléporter dans la tête des autres, on est mieux équipés pour bien saisir les enjeux d’une situation donnée, pour prévenir les faux-pas et, éventuellement, pour modeler notre comportement dans notre intérêt personnel. Utile dans un contexte familial (comprendre ce qui se passe derrière le masque buté de ton ado), social (saisir l’ambiance d’une réunion ou d’un party) et professionnel (décoder le message que ton patron veut vraiment faire passer).

Pratiquer le nunchi, c’est aussi adapter son comportement à son environnement, en portant attention à notre gestuelle, à notre comportement non verbal, à notre intonation. Et c’est comprendre où on se situe – d’un point de vue social, historique, hiérarchique – par rapport à l’autre.

L’objectif ultime? Établir des liens de confiance et des relations authentiques. L’harmonie est valeur importante dans la culture coréenne, où on valorise les rapports respectueux en société, tant dans la vie privée que publique. Ne pas faire de faux-pas, ne pas irriter, ne pas offenser, ça compte!

Les humains ne sont évidemment pas tous doués en la matière. On utilise le terme nunchi eoptta pour décrire ceux qui sont ineptes en société (on en connaît tous!), et le terme nunchi ioda pour décrire ceux qui ont l’esprit vif et qui peuvent décoder les comportements d’autrui en une fraction de seconde.

Au fond, pratiquer le nunchi, c’est tout simplement être hyper attentif. Écouter, vraiment. Ne pas interrompre. Observer à la loupe les expressions non verbales, comme la courte pause avant de répondre à une question, le petit geste d’impatience, les soupirs, les regards qui se croisent. C’est se centrer sur l’autre, dans le moment présent, plutôt que sur nous, nos besoins, nos insécurités. C’est contraire du nombrilisme, qui sévit pas mal partout ces jours-ci !

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