Entre nous: devenir mère pour la première fois, avec Catherine Perreault-Lessard

Brillante, pétillante, curieuse avec un grand C, Catherine Perreault-Lessard roule sa bosse dans le domaine des médias depuis longtemps, même si elle n’a que 34 ans. Elle a fait sa marque comme rédactrice en chef chez Urbania et chez Ricardo; elle travaille maintenant comme productrice au développement télé et «Fille de contenu» (c’est sa marque de commerce!). Parce qu’elle n’a pas la langue dans sa poche, on a voulu savoir comment l’aventure de la maternité s’est déroulée pour elle.
photo FÉlix Renaud



 

Ton chum et toi, vous vous êtes rencontrés où et comment?
On s’est rencontrés à un spectacle de Jean Leloup, par l’entremise d’une amie. À l’époque, il avait une blonde et je m’intéressais davantage à son meilleur ami. On s’est revus plus tard dans le cadre du travail. Je l’ai embauché pour un contrat de réalisation. Il était alors célibataire et ça a été le gros coup de foudre.

Comment as-tu réagi lorsque tu as appris que tu étais enceinte?
Ça faisait plusieurs mois qu’on «essayait» de concevoir un enfant, mon chum et moi. En voyant le petit «plus» sur le test de grossesse, je m’attendais à crier ou à pleurer de joie. Pourtant, sur le coup, j’ai surtout ressenti un grand vertige. Soudain, j’étais super stressée à l’idée de devenir mère. Tout d’un coup, ça devenait vrai. Un jour, tu fais l’amour. Le lendemain, tu es enceinte. Wow!

L’idée qu’on se fait de la maternité ne correspond pas toujours (jamais?) à la réalité. Est-ce que ça a été le cas pour toi?
En général, je trouve que les gens autour de moi véhiculaient une vision assez pessimiste de la maternité. Pendant ma grossesse, on n’arrêtait pas de me dire d’en profiter parce que j’allais perdre toute ma liberté… J’avais l’impression que ça allait être un véritable cauchemar. Pourtant, c’est – de loin! – l’expérience la plus incroyable que j’ai vécue dans ma vie.

Avais-tu un plan pour ton accouchement?
J’avais écrit un plan quelques jours auparavant, parce que mon médecin me l’avait demandé… mais, finalement, je ne l’ai jamais sorti de ma valise! Je ne voulais rien prévoir pour ne pas être déçue.

Tu as eu une césarienne. Certaines femmes vivent ça, à tort, comme un accouchement raté. Commentaire?
C’est une phrase que j’entends souvent: «Es-tu déçue?» Et, sincèrement, je ne comprends pas pourquoi les gens nous demandent ça… Je crois même qu’on devrait arrêter de poser cette question aux femmes! Plus on la pose, plus on nous donne l’impression que notre accouchement était raté. C’est vrai, je ne comprends pas en quoi je pourrais être déçue d’avoir sauvé la vie de mon enfant!

Quelques mots pour décrire les premiers moments avec ton fils…
Fébrilité. Soulagement. Excitation. Amour.

La fragilité du nouveau-né, ça t’a fait quel effet?
Au début, je trouvais que c’était énormément de pression d’avoir sa vie entre mes mains. Parfois, j’avais le vertige. Je trouvais que c’était une trop grande responsabilité pour moi et que je n’étais pas digne de ça… Je suis hyper gaffeuse et j’avais vraiment l’impression de pouvoir mettre sa vie en danger en commettant un impair. C’est entre autres pour ça que je détestais lui donner son bain: j’avais toujours peur de l’échapper et qu’il se noie. Aujourd’hui, ça va mieux. Comme j’ai un grand garçon, bien costaud, c’est plus facile de vivre avec cette peur.

Te sens-tu plus vulnérable maintenant que tu es mère?
Je l’étais déjà énormément auparavant, donc, pas vraiment. Je dirais que je suis de plus en plus anxieuse, par contre. Je suis une fille assez relax dans la vie, mais, désormais, je stresse en traversant la rue, de peur que mon enfant se fasse frapper.

La chose la plus importante que tu as apprise sur toi en devenant mère?
Que je suis capable d’être une bonne mère! C’est quelque chose qui me faisait énormément peur, parce que je n’ai jamais été bonne avec les bébés. Je les ai toujours fait pleurer! Mais, avec mon gars, c’est différent, c’est facile. Je suis bonne pour comprendre ses besoins, pour le «sizer». C’est toute une révélation!

Le meilleur conseil qu’on t’ait donné?
J’ai reçu une tonne de conseils, mais il n’y en a pas un qui m’a servi. Parce que la maternité, c’est hyperpersonnel et c’est imprévisible.

Le conseil que tu aurais aimé recevoir?
J’aurais aimé qu’on arrête de me donner des conseils et qu’on me dise à quel point ça peut être le fun!

L’erreur que tu ne referas pas?
Choisir le congé de maternité court du RQAP, plutôt que le congé long.

Une lecture sur la maternité qui t’a aidée?
Une naissance heureuse d’Isabelle Brabant. C’est écrit par une sage-femme et ça parle des accouchements en maison de naissance. Même si j’ai accouché en milieu hospitalier, ça m’a fait beaucoup de bien de lire différents témoignages de femmes pour qui ça s’est bien passé. Ça m’a rassurée, disons.

Un truc dont tu es fière?
Je suis allée avec mon bébé voir un film de Xavier Dolan un samedi de pluie au cinéma Beaubien. La salle était pleine à craquer. Quand je me suis assise, mes voisins de siège ont changé de place. D’autres m’ont regardée de travers. Finalement, mon bébé n’a pas fait un bruit de toute la représentation. Je suis fière de leur avoir prouvé qu’on pouvait être mère et aller au cinéma quand même.

Qu’est ce que le bébé a changé dans tes rapports de couple?
D’un côté, je nous sens beaucoup plus forts qu’avant. On regarde notre bébé et on est vraiment fiers d’avoir accompli ça ensemble. Je nous trouve beaux! De l’autre, je dirais que notre vie est beaucoup plus routinière qu’avant. On passe plus de temps devant la télé.

Trouves-tu que le partage des tâches est équitable? As-tu l’impression d’avoir plus de responsabilités que ton conjoint?
Aujourd’hui, oui, tout à fait. Je dirais que le partage des tâches est vraiment injuste durant le congé de maternité. On passe beaucoup plus de temps avec le bébé, surtout lorsqu’on allaite. C’est une réalité que j’ai eu beaucoup de difficulté à vivre au début; par exemple, lorsque je réalisais que mon chum pouvait sortir quand il voulait sans se sentir coupable ou sans avoir à planifier quoi que ce soit. Au début, je l’enviais énormément et je commençais à lui en vouloir, jusqu’à ce que ma mère me fasse réaliser que j’étais beaucoup plus chanceuse que lui parce que je vivais des moments tellement précieux avec mon bébé, des moments qu’il ne vivrait jamais.

Ton conjoint voyage souvent pour son travail. Être seule avec le bébé, ça se passe comment?
Mon truc, quand il part, c’est de me prévoir plein d’activités et de demander de l’aide. Dès que les dates sont fixées, je demande à ma belle-mère de venir me donner un coup de main.

Tu es une personne active intellectuellement; est-ce que c’est un challenge de passer tes journées à la maison?
C’est une des choses qui me faisait le plus peur avant d’accoucher. Dans les premières semaines, j’ai vite réalisé que j’avais bien d’autres chats à fouetter… Aujourd’hui, j’ai plus d’espace mental pour ça!

Arrives-tu à aménager des plages de temps pour toi?
Oui, mais ça me demande beaucoup de préparation. Au début, je trouvais ça vraiment difficile d’être séparée du bébé. (À preuve, j’ai passé une heure à pleurer sur la chaise de mon coiffeur la première fois que j’ai été loin de lui.) Maintenant, ça va mieux, mais ce n’est pas encore parfait.

Te sens-tu coupable lorsque tu fais garder ton fils?
Oui, souvent. C’est vraiment une des choses qui me frappe le plus de la maternité… à quel point on se sent toujours coupable de tout et de rien. Je passe mon temps à me culpabiliser et c’est parfois très lourd; j’essaie de lutter quotidiennement contre ce sentiment, parce que je sais que ça n’a pas de bon sens!

Tu es pigiste. Trouves-tu que c’est un avantage pour une nouvelle mère ou bien trouves-tu que c’est insécurisant?
Avec le recul, oui, je crois que c’est insécurisant et je considère accepter un poste à temps plein.

Fais-tu du sport ou tu as mis une croix là-dessus?
J’ai recommencé le yoga lorsque mon bébé avait cinq semaines et la cardiopoussette, la semaine suivante. C’est parfois difficile, mais ça me fait le plus grand bien!

As-tu des rendez-vous maman-bébé?
Oui, souvent! J’ai développé de nouvelles amitiés avec des filles que je connaissais et qui sont tombées enceintes en même temps que moi. On se fait des après-midi de popote ensemble. C’est pratique, parce qu’on peut toujours compter sur l’autre pour s’occuper du bébé quand il pleure et qu’on brasse la sauce. En plus, c’est super le fun et ça nous revient bon marché!

Peux-tu compter sur un groupe de soutien?
Oui, je suis super bien entourée. J’ai quatre gardiennes!

Es-tu du genre qui va partout avec son bébé? Comment se passe l’accueil?
Je l’amène partout: au cinéma, à l’épicerie, au centre d’achats… Au début, j’avais constamment peur qu’il se mette à pleurer, mais, aujourd’hui, cette peur est partie. J’ai donc développé une grande confiance en mon bébé: je sais que ça va bien se passer. En général, l’accueil se passe effectivement super bien. Je dirais même plus: voir la réaction des vendeurs ou des caissiers qui me disent à quel point ils le trouvent beau, ça me fait du bien!

Es-tu à l’aise lorsque tu allaites ton bébé en public?
Oui! Je ne me suis jamais cachée et c’est entre autres grâce à mon chum. Dans les premières semaines, j’étais un peu gênée et c’est lui qui m’a convaincue de ne pas m’en faire avec ça, parce qu’une femme ne devrait jamais se cacher pour nourrir son enfant.

Vois-tu ta mère d’un autre œil maintenant? Vos rapports ont-ils changé?
Je pense qu’avant d’avoir un enfant, on ne réalise pas tous les sacrifices que notre mère a faits pour nous, et on ne mesure pas tout l’amour qu’elle nous a donné. C’est un cliché, mais c’est tellement vrai. Aujourd’hui, je réalise à quel point j’ai souvent été ingrate, surtout en me faisant croire à l’adolescence que ma mère ne m’aimait pas… C’est faux, elle m’a tellement aimée! En ce qui concerne nos rapports, oui, ils ont changé. On se voit beaucoup plus et je lui parle plus souvent au téléphone. Comme elle est infirmière, elle est toujours de bon conseil.

As-tu envie d’avoir un autre enfant?
Oui. Et je suis enceinte du deuxième!

 

 

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