Une femme, ailleurs: Stephanie, de Copenhague

Nous avons rencontré Stephanie Hessel Gjerding dans une boutique de Copenhague. Une femme aussi belle à l’intérieur qu’à l’extérieur, qui vient de lancer son entreprise-conseil avec des artistes danois. Elle nous raconte sa vie, là, maintenant.
Propos recueillis par MJ Desmarais  Photos Marjorie Guindon



Qui es-tu, Stephanie?
J’ai 29 ans. Je vis dans le quartier de Nørrebro, en plein centre de Copenhague, avec mon copain Joachim. On se connaît depuis dix ans, on est ensemble depuis trois ans. J’ai récemment terminé un bac en entrepreneuriat de l’Institut du design et des technologies et, depuis, j’accompagne des boutiques lifestyle dans leur positionnement et leur développement d’affaires. Avec mon amie Chili (c’est son nom!), qui est aussi passionnée de design que moi, j’ai réalisé un rêve d’enfance en fondant ma propre entreprise, Quiet Rebel Atelier. Notre mission: aider les artisans danois à bien raconter leur histoire pour mieux vendre leurs produits.

Le rythme paisible de Copenhague
J’ai vécu à Londres il y a quelques années, à une époque où je ne savais pas trop quoi faire de ma vie. Cette expérience formidable m’a donné de l’assurance, mais mon cœur est à Copenhague. J’aime la vibe de ma ville parce qu’elle est hyggelig – c’est un dérivatif de hygge, ou cozy – et parce que notre rythme de vie est tranquille. Partout, il y a des parcs, des cafés, des petites rues bordées de boutiques uniques et de vieux immeubles qui ont une histoire à raconter. Ce que j’aime par-dessus tout, c’est l’absence de tours. Notre paysage urbain respire, et les nouvelles constructions s’agencent parfaitement aux plus anciennes. Copenhague est une ville relativement petite (elle compte un peu plus de 600,000 habitants), mais elle est aussi vibrante que certaines grandes cités. À sa manière, très relax! Il faut dire qu’avec autant de vélos sur la route, il y a moins d’embouteillages et de bruit qu’ailleurs.

À vélo, partout, tout le temps
Comme pas mal tout le monde à Copenhague, je me déplace en vélo: c’est simple, pratique, ça ne coûte rien et ça me permet de prendre l’air. Une balade sur deux roues plutôt qu’un transit motorisé me permet aussi de prendre une pause dans ma journée. J’en profite pour faire le vide, me ressourcer et profiter de ce qui défile autour de moi. En fait, je travaille là-dessus: je veux vraiment tout remarquer et admirer les petites choses sur mon parcours. La plupart des gens sont très occupés et veulent passer du point A au point B le plus rapidement possible, la tête remplie par leur agenda, leurs rendez-vous, leurs soucis. Ils ne voient rien.

Le hygge n’est pas une tendance
Ça joue un rôle vraiment important dans mon quotidien! Mais cet art de vivre typiquement danois peut, au fond, se pratiquer dans tous les pays. Nous avons tout simplement trouvé un très beau mot pour exprimer un sentiment, une expérience, un endroit! Pour moi, l’esprit hygge, c’est quand je me sens profondément heureuse, relax, paisible et aimée, que je sois seule ou bien entourée. Ce sentiment n’a rien à voir avec l’argent ou les possessions matérielles, mais plutôt avec quelque chose qui nourrit l’âme et l’esprit. Pour que le hygge se propage à la maison, j’allume des bougies, je mets de la musique, je me fais un café, je lis un livre ou un magazine. Préparer le souper avec Joachim ou des amis en buvant un verre de vin – toujours avec des bougies et de la musique – c’est aussi très hygge. Ces moments où on laisse aller les tensions du quotidien, où on prend le temps de respirer, de profiter de la vie et de passer du temps avec soi et les autres, sont l’essence même de la vie.

 

L’art de vivre l’hiver
Pour pallier le manque d’ensoleillement – les journées d’hiver sont très courtes au Danemark – nous avons une façon très particulière d’utiliser l’éclairage, en agençant différentes sources de lumière artificielle avec beaucoup, beaucoup de bougies. Certaines personnes atteintes de dépression saisonnière s’évadent vers des destinations soleil. Pas moi! J’aime beaucoup le rythme des saisons en Scandinavie et pendant les mois les plus sombres, au lieu de déprimer, je me fie au hygge pour créer des atmosphères invitantes. Joachim et moi, on aime marcher dans le noir à Copenhague sous la neige ou la pluie, même lorsqu’il fait froid. C’est vrai qu’on ne fait pas beaucoup de rencontres! Je trouve que c’est important et très satisfaisant de faire du mieux qu’on peut avec ce que la vie nous pose comme défis.

Un appart à Nørrebro
Il y a un an, Joachim et moi avons acheté un appartement à Nørrebro, un quartier animé tout près des lacs et de la rue Blågårdsgade, une artère où l’on trouve tout plein de restaurants et de petites boutiques. Quand j’étais enfant, on passait souvent par là pour rendre visite à mes grands-parents et je suis tombée très jeune sous le charme des beaux immeubles du 19e siècle et de cette impression d’espace que crée la proximité avec l’eau. Je me disais que j’allais habiter là un jour et je suis vraiment heureuse d’avoir réalisé ce rêve!

Le coût de la vie est élevé à Copenhague, surtout pour le logement, et on ne peut rien y changer. Notre appartement, nous l’avons presque entièrement rénové de nos mains, avec l’aide de nos amis et de nos familles. Ça a été toute une aventure! J’ai fait de l’électricité, usé de ma créativité, on a travaillé fort et, oui, il y a eu des moments stressants. On a décidé comme ça, un samedi soir, de casser les murs de notre cuisine et de tout reconstruire parce que des fissures nous inquiétaient. Nous avons maintenant de magnifiques murs de brique exposée.

La décoration de ma maison témoigne de ma passion pour le design. J’ai des critères stricts pour sélectionner des objets, qu’ils soient fonctionnels ou à vocation décorative. La plupart de nos meubles sont vintage ou faits sur mesure, parfois par nous. Chez nous, presque toutes les pièces sont uniques, même la vaisselle. Au début, mon copain ne comprenait pas trop l’idée, mais j’ai remarqué qu’il prend maintenant son temps pour sélectionner la bonne tasse pour son café du matin, ce qui me remplit de joie.

Le café du coin plutôt que le resto
Nous passons beaucoup de temps à cuisiner à la maison, et nous aimons improviser sur le thème de la cuisine nordique. Joachim et son père chassent à l’occasion: si nous avons de la viande au menu, elle est toujours sauvage, sinon nous nous en tenons aux plats végétariens. Dans mon pays, on se soucie de plus en plus des questions écologiques et j’en suis très fière. De nos jours, les aliments bios sont à peine plus chers (5 à 15%) que les aliments réguliers, ce qui les rend tout à fait abordables.

Le bien-être avant le paraître
Je prends soin de moi et je suis à l’écoute de ma voix intérieure. Je ne rêve pas de décrocher un job ultra payant, d’avoir un agenda rempli à craquer. Ce qui compte pour moi, c’est de faire ce que j’aime au rythme qui me convient, et de vivre dans le présent. Je cours ou je fais du yoga à l’occasion, je mange santé (d’accord, 80% de ce que je mange est bon pour mon corps et 20% est bon pour mon moral), je fais des balades en nature, j’apprécie ces moments de tranquillité et de quiétude. Je me maquille très peu, en tout cas moins qu’avant. Ce qui m’intéresse, c’est d’avoir un look tout simple et naturellement radieux. Je n’ai pas envie de me couvrir, je me sens bien comme je suis. C’est très scandinave, tout ça.

 

Être une femme au Danemark
Notre situation est plutôt privilégiée! Nous savons que nous pouvons toujours compter sur notre État-providence qui nous appuie pour nos études et nos congés de maternité, et qui nous donne un filet de sécurité en cas de chômage ou de maladie. Je crois que tout est possible pour les Danois, femmes et hommes confondus. À cette étape de ma vie où je travaille à façonner mon avenir et à lancer mon entreprise, j’ai la chance d’être soutenue par différents organismes qui me prodiguent conseils et accompagnement. C’est vraiment génial de sentir qu’on peut réaliser nos rêves.

Le prochain projet
La famille de Joachim possède une très belle propriété en Suède, installée en pleine nature et dans le plus parfait silence au beau milieu de nulle part. L’eau provient d’un puits, l’électricité est acheminée par des panneaux solaires, on cuisine sur un gril à gaz. Plus on y séjourne longtemps, plus on apprécie les petites choses, la coopération nécessaire à la survie dans le bois, le rythme du slow living. J’aimerais y vivre pendant plusieurs mois, en cultivant un potager pendant que Joachim chasse, question de voir si on peut vraiment survivre de façon autonome. Bon, c’est un peu extrême. En attendant, j’aime beaucoup voyager dans les pays où la nature est prédominante. Joachim aime le hiking et il m’a récemment offert une paire de bottes de randonnées. C’est un bon départ!

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